Le prêcheur

Juste avant l’entrée du bourg, sur la droite, un panneau qui attire l’œil. Il indique la « Cité de la solidarité ». Je ne résiste pas à aller voir ce qui s’y joue et j’y découvre une série de petites constructions de bois, de deux ou trois petites pièces au plus. Les plus modestes sont au gabarit des pauvres cases de 6 par 3 qu’ont connus les Antillais les plus démunis autrefois. On a du mal à imaginer, dans l’habitat martiniquais d’aujourd’hui où certaines villas rivalisent de grandeur et où les résidences défiscalisées se donnent des airs de Riviera, qu’il puisse s’agir de constructions récentes. Pourtant elles ne datent que des années 80, à en croire les habitants rencontrés.

De ces habitants, en l’occurrence, j’ai fait deux photos, avec deux maisons se faisant face. Le groupe d’amis de Guy, réuni autour d’un breuvage local, puis Daniel et sa famille regroupée après la sortie d’école des enfants.

Juste après, je suis allé dans le bourg proprement dit où je n’ai rien fait de vraiment bon si ce n’est une image des latrines publiques au soleil rougeoyant, manque d’inspiration dont j’espère que les 1717 Préchotins ne me tiendront pas rigueur.


Le Prêcheur, 17 octobre 2011, 16h15


Le Prêcheur, 17 octobre 2011, 16h30


Le Prêcheur, 17 octobre 2011, 17h05

Sainte Anne et les Salines

Sainte Anne, l’extrême Sud de la Martinique, avec son maire indépendantiste, sa célèbre plage des Salines. Peut-être une Martinique plus proche des souvenirs des quelques touristes qui viendraient à passer par ce blog.

Les photos sont d’octobre 2011 et mes vœux pour l’année 2012 sont de tout de suite, là, maintenant !


Dans le Bourg.


Boutique aux Salines.


Petit resto de plage, aux Salines encore.

C’est le moment !

Pour le photographe de paysage, la lumière naturelle est un des paramètres esthétiques et techniques sur lesquels il n’a pas de prise directe. En studio, avec les outils et compétences ad hoc, on fait pratiquement ce que l’on veut. En extérieur, en revanche, difficile de bouger ou de graduer la source principale, un certain Monsieur Soleil (Madame n’est plus disponible depuis quelques années).

On a cependant encore la possibilité de choisir le moment de la prise de vue, en sachant que l’astre du jour a la bougeotte prévisible et que le photographe bien informé n’a qu’à se tenir prêt au bon moment pour que le gros projecteur soit au bon endroit. Une façon de marier l’instant décisif avec la manière lente des contemplatifs !

Il restera le paramètre nuage, qui viendra éventuellement mettre un filtre devant la source, mais ça, c’est moins facile à prévoir.

Pour calculer les positions du soleil au long d’une journée donnée et pour un endroit donné, il existait auparavant un logiciel pour Palm. Peut-être cela existe-t-il aujourd’hui sur smartphone, mais il y a sur Internet un site très pratique : sunposition.info.

Voilà ce que cela donne pour mon quartier et aujourd’hui :

On a deux informations : l’orientation du soleil par rapport à la boussole (son azimut) et la hauteur (en degrés).

On voit que le soleil passera l’horizon à 6h30 au cap 128. Qu’à 8h, il sera à une hauteur de 20°, dessinant des ombres assez longues si c’est ce que l’on cherche. Qu’au plus haut, il sera à 52° à 12h, ce qui donne encore un certain modelé au paysage, quelque chose comme une lumière méditerranéenne. Le passage d’Est en Ouest est par ailleurs assez régulier, ce qui donne la possibilité de choisir une orientation de la lumière en fonction des façades de bâtiments que l’on veut au soleil ou à l’ombre. En bref, sauf formation nuageuse impromptue, toute la journée sera propice à faire des photographies mariant la lumière et les ombres.

Pour comparaison, voilà ce qui m’attend dans six mois :

Là, le soleil ne change pratiquement pas d’azimut pendant 5 à 6 heures, grimpant à plus de 80°. Entre 10h et 14h, on a donc une lumière de plomb qui tombe comme une douche, éclate de lumière et métallise le sommet de tout les objets. Au passage, on voit que le soleil bascule en deux heures à 180°… en passant par le Nord, pour finalement redescendre aussi fixement et aussi longuement qu’il est monté.

Dans ces conditions, pas facile de choisir l’azimut ! C’est un peu tout ou rien. Soit tel côté le matin, soit l’opposé le soir. On peut au moins se consoler en considérant qu’à cette période les façades au Nord sont éclairées.

Pour voir l’évolution des ombres en fonction de la course du soleil, on peut aller sur le site astro.unl.edu. Pour info, la Martinique est à la latitude 14,4N environ. En jouant sur les paramètres, on découvre que le 28 avril à 11h57 locale, le soleil sera à 90° à son zénith !

Le graphique de sunposition confirme :

Ce jour là, il sera plus simple de faire des photos dans les rues d’Amiens…

… s’il ne pleut pas !

Le François

J’ai appris récemment que celles de nos communes qu’on désigne par des prénoms ou même des noms communs : le François, le Robert, case Navire, le Marin… puisent ces dénominations dans une tradition amérindienne. En effet, les chefs amérindiens avaient coutume d’échanger leur nom avec celui du colon en signe d’amitié. Il y eu donc, sur la façade Atlantique, des chefs qui rencontrèrent un François et un Robert, et sur la façade caraïbes deux autres qui échangèrent leurs noms avec de plus facétieux « Marin » et « Navire ».

Me voilà maintenant pris d’un doute quant au chef Arlet ! Je ne sais pas si un sieur Arlet venu de Nantes où d’ailleurs a croisé un chef dans les Anses qui portent maintenant le même nom ou si c’est bien un patronyme autochtone.

En tous cas, au François, je n’ai pas vu d’indien.


Le 13 octobre à midi. Peu après avoir quitté le Saint Esprit, quartier Saint Laurent, sur la route du François, j’ai croisé Saint Michel qui était en train de mettre une tannée au démon. J’ai fait ma photo en me gardant bien de faire le malin. J’ai oublié quel Saint le propriétaire des lieux, André-Marie-Joseph de son prénom, voulait mettre à la place, mais il n’a pas trouvé son bonheur au magasin des saintes céramiques et nous voilà donc avec un Saint Michel par défaut.


Le 13 octobre à 15h05. Quartier Dumaine. Celle là, vous ne la trouverez pas sur des dépliants touristiques, pourtant, ceux qui connaissent la Martinique on déjà vu ça. Et sans doute ailleurs aussi. C’est aussi un des grands plaisirs qu’on tire à explorer le style documentaire, que de pouvoir s’affranchir de toute notion de beau, et même de spectaculaire. J’aime beaucoup cette photo. Dans chaque objet je vois celui ou celle qui l’utilise. En plus, le jus que la dame m’a servi était bien frais. Dans la maison, on entendait la télé débiter des conneries au kilomètre et un gosse en bas âge qui découvrait qu’il avait une voix.


Le 13 octobre, à 14h40. Presque en haut du Morne aux Vents, je dois avouer que je m’étais un peu perdu. Pendant une bonne demi-heure, je ne suis pas arrivé à trouver la route pour redescendre au François, repassant plusieurs fois devant cette remorque à pizza. Il fallait sans doute que je mette Tom et Jerry dans la boîte pour conjurer ce sort, puisque aussitôt après j’ai retrouvé mon chemin.

La grande voie de Sainte-Thérèse

Lors de l’opération d’assainissement et de lotissement des Terres-Sainville en 1920,  les habitants les plus déshérités de ce faubourg le quittèrent pour rejoindre les bords de l’entrée Sud de la ville, emportant avec eux la chapelle de bois consacrée à Sainte-Thérèse, qui fut remplacée aux Terre-Sainville par une église en dur, et donnèrent ainsi un nom au quartier qu’ils créaient.

Sainte-Thérèse est un des quartiers majeurs de la ville. Mais c’est un quartier très particulier en ce sens qu’il est avant tout assimilé à une route, celle qui a longtemps été la seule entrée Sud de Fort de France.

C’était un quartier où l’on trouvait quelques coolies, ces descendants d’engagés indiens, mais aussi des chinois et tout un monde de miséreux. Aujourd’hui encore, on y compte pas mal d’Haïtiens.

En 1965, il y eu trois jours d’émeutes à la suite de l’arrestation de Pierre Just Marny.

Et cette route à quatre voies qui déverse son flot continu de véhicules doit être élargie pour ajouter les voies du futur tram, ce qui signe l’arrêt de mort de multiples commerces riverains.

Preuve que le quartier a gardé de son caractère explosif, ce lundi, des émeutes ont éclatées entre les jeunes et la police à propos de la fermeture d’une épicerie. Le calme est revenu, on en saura plus demain, mais en voici quelques images d’un monde perdu.


93, avenue Maurice Bishop, le 14 mars 2010 à 11h15


97, avenue Maurice Bishop, le 12 mai 2011 à 11h40


67, avenue Maurice Bishop, le 12 mai 2011 à 10h50
Au fond, l’actuelle église de Sainte Thérèse, condamnée depuis le tremblement de terre de 2007.


59, avenue Maurice Bishop, le 12 mai 2011 à 10h10


194, avenue Maurice Bishop, le 26 mai 2011 à 15h45
Pour ceux qui ont suivi les épisodes précédents, c’est ici que le ressort du dos de la chambre a cassé, au printemps dernier.


Rue François Rebould, le 11 mai 2011 à 11h10
L’atelier est spécialisé dans la pose d’emplâtre de pneu.
A l’écart de l’avenue, il n’est pas menacé.

Marie, Marie

Désolé pour les amateurs de San Antonio, la nièce n’est pas de la partie pour cette fois !

Retrouvant l’inspiration de quelques images ici dévoilées, je vous propose deux petits oratoires consacrés à la Vierge, comme on en rencontre souvent sur les terrains privés. Ces derniers jours, cherchant des éléments à isoler du paysage, je tombe sur pas mal de bondieuseries. Ce n’est pas un penchant personnel, mais je trouve qu’il y a là tout à coup quelque chose d’autre que l’aplat du paysage qui surgit. Au delà de la spiritualité, il y a de l’épaisseur, de l’histoire, du sens, de l’humanité. Quand je regarde ces images, je ne sais pas pourquoi, mais j’ai l’impression de sentir comme ce qui sépare la finesse de l’analogique de la sécheresse du numérique. Je ne parle évidemment que de sensations, ce qui ne veut rien dire techniquement et ne veut surtout pas réveiller la vieille querelle argentique/numérique.



Chez Jean-Yves et Sylvie, en juillet, alors que la journée s’achève.


A l’entrée de l’habitation Eden, à l’Ajoupa Bouillon, fin septembre.

Narratif ?

En faisant des images dans le Nord, la semaine passée, j’entendais Jean-Louis Murat à la radio. Il parlait de chanson française et de ce qu’elle aurait abandonnée de son caractère narratif.

Narratif, narratif… ça m’a relancé sur une problématique à laquelle je suis confronté, après deux ans de ce travail de photographe intermittent. Je compte deux ans, puisque mes premiers clichés en N&B datent certes de juin 2009, mais les premiers en couleur sont d’octobre de cette même année. Et dans le même temps que ces deux années s’écoulaient, j’ai terminé un film, j’en ai fait deux autres et écrit un quatrième (que je tourne prochainement), ce qui a conféré à mes échappés photographiques un caractère forcément intermittent.

Deux ans écoulés, donc. Et un peu moins de 500 plans-films exposés. Au début, c’était le temps de l’apprentissage de l’outil. Et puis il y a eu celui d’une production déjà plus assurée, mais avec encore l’expérimentation des possibles formels. A présent, au delà du projet initial de mettre en images le paysage urbain Martiniquais, il faut assumer le costume d’auteur et « raconter une histoire ». Cela passe par des portraits, peut-être. Et des petites choses comme celles-ci.


Au bout du bout du rivage Nord Atlantique, au port de Grand Rivière, il était midi.


Macouba, de très petites sépultures, d’à peine plus d’un mètre vingt de long, où ne reposent pas que des enfants.
Et aussi l’absence de croix sur un nombre important d’entre elles.

De quoi ceci est-il l’histoire ?

Narratif, narratif ?

Carènes

J’ai toujours été attiré par la zone du port. Pour un terrien comme moi, il y a du mystère, du voyage et déjà un parfum d’ailleurs. Ce travail sur le paysage Martiniquais ne pouvant pas s’envisager sans voir la mer et surtout les bateaux, voici deux images récentes.

Fin mai, au bassin de radoub, les équipes de la marine étaient occupées à refaire une beauté au Dumont D’Urville. J’ai d’abord réalisé une image par le flan bâbord, le pied à son plus haut et le photographe juché sur un canon datant sans doute de la campagne du Mexique et recyclé en bollard. Puis je me suis installé au mitan de la porte du bassin pour cette vue là, juste avant que les ouvriers ne quittent le chantier.

La semaine dernière, je me suis présenté à la zone de l’ancien port de commerce pour refaire dans la lumière du soir venant, une photo de cette épave que j’avais réalisée au petit matin l’an passée. J’ai hélas constaté que les lieux avaient été bouleversés par une extension de la centrale électrique voisine et que l’axe et le cadrage frontal utilisés il y a un an n’était plus possible. Le vigile de l’entrée du port m’a heureusement gentiment laissé pénétrer l’enceinte pour attraper cette atmosphère de fin de journée.

Osons du G-Claron !

Et hop, me voilà détenteur d’un 240mm, focale dont j’avais envie depuis un moment.

J’envisageais d’abord un Apo-Sironar S 240, dans la même famille que mon 300 Sinaron (S, donc un simple N chez Rodenstock). Mais finalement, le passage de la Sinar à l’Arca m’ayant donné aussi des envies de légèreté et de compacité, j’ai opté pour un G-Claron racheté à Francois C., sur le forum de galerie-photo. La grande question était de savoir si ça couvrait assez en 8×10. D’après François oui et d’après d’autres non. Voici la preuve que ce sont les autres qui avaient tord !

A Bellefontaine, cette focale est idéale pour « faire » cette kay de l’autre côté de la route du littoral. Mon exemplaire du petit Schneider couvre bel et bien le 8×10. Ici nous avons 1 cm de décentrement vers la droite et 2 cm vers le haut, plus une bascule avant de 2°. Il n’y a aucun vignettage. En tenant compte de la bascule, cela correspond à un décalage de 3cm sur le rayon soit 6 cm sur le CI.

Là, en revanche et 50m plus loin, on atteint les limites du CI, avec 3,5 cm de décentrement vers la droite, 2,5 cm vers le haut, et une bascule avant de 3°. A l’endroit où ça vignette, je peux peut-être récupérer du ciel avec photoshop. sans le décentrement horizontal, ça passait encore. Et en tenant toujours compte de la bascule on aurait eu une augmentation du rayon de près de 4 cm, soit 8 cm sur le CI.

Le même endroit quelques heures plus tard. Même réglages et vignettage encore sensible mais supportable dans l’ambiance nuit.

Quoi qu’il en soit, ce 240 me plait beaucoup ! Ce qui ne gâche rien, ce sont ses dimensions, qui permettent de le laisser monté sur la chambre lors du rangement de cette dernière dans le sac à dos.

L’ensemble est particulièrement peu épais !

Si si, l’optique est bien là !

Et retour dans le sac à dos, prête à être dégainée.

Notez que le voile tube BTZS dans lequel j’enveloppe ici la chambre n’est pas adapté à une F-Line bien moins rigide qu’une Norma. Le simple fait de retirer le voile (et son élastique très serré) du cadre arrière peut dérégler légèrement la chambre. C’est encore pire si l’on prends le rail avec le cadre dans le tube. Demain, je pars avec le voile classique Harrison.

Et j’attends avec impatience l’arrivée de mes planchettes 110, lesquelles me permettront de remplacer le Sinaron par un Fuji A 300 que je viens de recevoir. J’aurai ainsi dans le sac à dos trois optiques très compactes :  G-Claron 240,  Fuji A 300, Fuji C 450. Si ça continu, je vais commencer à savoir ce que je fais et avec quoi je le fais ! Mon objectif initial d’apprentissage productif serait-il en passe d’être tenu ?